Clyde Drexler, l'ombre de Michael Jordan
- Gaspard Devisme
- 11 févr. 2023
- 17 min de lecture
La NBA des 80s et 90s regorge de légendes, dont un bon paquet privées de titre par les différentes dynasties de leur génération. Pourtant, le nom d’un de ceux qui a échappé à cette pénurie passe régulièrement aux oubliettes : Clyde Drexler. The Glide, (le planeur en français) a une carrière des plus sérieuses, d’autant plus à un poste où la vedette de l’époque n’est autre que Michael Jordan. Si la raison derrière son surnom est plutôt explicite, sa carrière est aussi méconnue que sous-estimée. Flashback.

Toujours garder une vue panoramique sur la concu
Un arrière d'environ deux mètres, dans les quatre-vingt-quinze kilos, légende des années 80 et 90. Si le premier nom qui te vient à l'esprit ne commence pas par "Jor" et ne finit pas par "dan", on a soit affaire à un menteur, soit un hater. Mais n'en déplaise à MJ lui-même, il n'est pas le seul poste deux de la fin du XXème siècle à avoir marqué la NBA de son empreinte.
Enfant de Houston, Clyde Drexler y grandit et y réalise tout son cursus scolaire. Une proximité avec le centre spatial de la NASA qui explique peut-être l'aversion de l'intéressé pour le concept de gravité. Mais avant de monter au cercle et de faire parler son fouetté du poignet droit, c'est au baseball que Clyde parvient à exprimer son talent (prend ça Michael). En effet, durant ses premières années au lycée, c'est avec un gant et une batte dans les mains que le futur All Star fait partie de la varsity team. Il finit par faire ses preuves et intègre l'équipe de son lycée, Sterling, où il est utilisé en tant que pivot (?!).
Quelques grosses perfs à l'adolescence lui permettent d'avoir le choix quant à sa future université, mais quand sa ville natale toque à la porte, le choix est rapide. Très utilisé dès sa saison freshman en 1980/81, Drexler s'envole pour de bon en tant que sophomore, fortement aidé par l'arrivée du freak Akeem Olajuwon à H-Town. Leur duo et les Cougars de Houston sont la Phi Slama Jama. En gros les mecs dunkent partout, tout le temps, peu importe ce que tu leur mets en face.

La fusée fonctionne
Une jolie épopée universitaire
Accompagnés de joueurs comme Michael Young ou Larry Micheaux, les deux stars participent à l'écriture de la plus belle page de l'histoire des Houston Cougars. Entre 1982 et 1984, l'université participe à chaque Final Four NCAA et enchaîne même deux finales en 1983 et 1984. La première participation du Glide et des siens au Final Four permet à l'arrière d'entamer la rivalité qui représentera le plus sa carrière dans l'imaginaire collectif. En effet, en demi-finale de la March Madness, les Cougars affrontent les Tar Heels d'un jeune arrière bien côté également, Michael Jordan si ça te parle.
Si Mike a pris pour insulte toute comparaison avec Drexler durant sa carrière, c'est peut-être lors de ce premier affrontement dans un tel contexte que la différence s'est faite. Jordan est un freshman, le numéro 22 des Cougars est un sophomore, mais North Carolina a dominé la saison régulière de sa conférence et ne se fait pas prier pour montrer qui sont les patrons. Une victoire 68-63, suivi d'un titre glané face à Georgetown, Michael Jordan 1-0 Clyde Drexler.
Un Final Four reste une réussite, d'autant plus qu'il reste une saison à l'université texane pour peaufiner son basket ultra spectaculaire et viser le titre NCAA. Après seize matchs de saison régulière, force est de constater que les Cougars sont pas dégueu. Zéro défaite au compteur pour entamer le tournoi universitaire, on a connu pire entame. Un parcours tranquille dans le tournoi de la région Midwest permet aux joueurs du coach Guy Lewis de rallier le Final Four pour y affronter Louisville en demi-finale... une formalité. En finale, c'est North Carolina State qui se dresse face à la Phi Slama Jama et ses stars. En regardant quarante ans en arrière, le Wolfpack n'avait pas le même effectif que l'université texane, mais ça ne les a pas empêché quelques leaders d'emmener l'équipe tout au bout du tournoi NCAA.
En effet, des joueurs tels que Thurl Bailey ou Dereck Whittenburg tirent leur épingle du jeu pour faire tomber la bête universitaire. Une finale accrochée, jusqu'au bout, qui voit les Loups hériter de la dernière possession à 52-52. S'en suit une belle passe à dix de quarante-cinq secondes et un shoot quasi au buzzer de Whittenburg. Presqu'une minute de possession pour au final balancer un tir à moitié au hasard du milieu de terrain. Shoot bien moche mais passe parfaite pour un Lorenzo Charles seul sous le cercle (bah alors Akeem ?) qui dunk ça juste avant que la sirène ne retentisse. 54-52 Wolfpack. Houston, on a un gros problème.
Bon, la fin n'est pas belle, mais Clyde Drexler sort d'une superbe saison en 16 points, 9 rebonds, 4 passes décisives et se dirige tout droit vers la draft, confiant comme il faut. Tout droit sorti de l'université de Houston, Clyde s'attend à être drafté par les Rockets, détenteurs des premier et troisième pick de la cuvée. Comme dans un rêve... jusqu'au moment où sa franchise de coeur change d'avis pour foncer sur Rodney McCray, justement éliminé par Houston et Drexler lors du Final Four précédent. Clyde The Glide glisse finalement au quatorzième rang, chez les Trailblazers de Portland.
Bye-bye Houston
Champions en 1977, les Blazers ont ensuite souffert du déclin rapide de l'icône locale Bill Walton et viennent tout juste de remporter leur première série de playoffs depuis le titre. Clyde Drexler arrive malgré tout dans un effectif composé de joueurs de talent et joue un rôle mineur durant sa saison rookie. L'arrière hérite de dix-sept petites minutes par match et passe derrière Jim Paxson, All Star et meilleur scoreur de l'équipe, dans la hiérarchie. La franchise fait une jolie régulière en 48-34 mais les Suns de Phoenix s'offrent un upset au premier tour des playoffs à l'Ouest. En postseason, Drexler jouit d'un statut similaire : dix-sept minutes, 7 points, quelques rebonds et une assist par-ci par-là. Le diamant demande à être poli, et Portland l'a bien compris.
À la draft 1984, les Blazers ont l'occasion, avec leur deuxième choix, d'aller chercher la pièce qui manque pour créer la prochaine dynastie qui règnera sur le ballon orange. Paxson + Drexler : la talent sur les lignes arrières on l'a. Ça tombe bien, le poto Akeem Olajuwon arrive de NCAA après une nouvelle défaite en finale. Mince, les Rockets ont le premier pick et retiennent le Nigérian dans la région. Il reste qui ? "Ben y'a bien un petit arrière pas trop mal mais ça va pas matcher quoi." "Il s'appelle comment déjà ?" "Ah oui, Michael Jordan." "Nan mais on a déjà Clyde ça fera doublon, on va plutôt tenter le coup Sam Bowie, un pivot bien solide."
Les plus perspicaces auront saisi le second degré. Les Blazers ont bien laissé passer la plus grande star de l'histoire de ce foutu sport pour un pivot en carton-pâte qui sort d'une mauvaise saison à l'université. Avec le recul, c'est plus facile de tomber sur le management de Portland. À l'époque, la NBA est une ligue de big men et Bowie a montré de belles choses avec Kentucky malgré une grosse chute au scoring lors de la saison 1983/84. Seulement, les blessures rattrapent le pivot beaucoup trop vite. Il avouera d'ailleurs plus tard que dès les tests physiques en vue de sa draft, il serrait les dents pour masquer les douleurs. Mais Clyde a beau avoir été victime de la comparaison avec Jordan, on parle bien d'un des meilleurs arrières n'ayant jamais foulé les parquets NBA et Portland s'en rend compte bien assez vite.

En cumulé, une détente sèche de 148 mètres
Lors des deux exercices suivants, le garçon devient un titulaire régulier à rip city et fait passer son scoring de 7 à 17 puis 18 points de moyenne tout en dépassant les 5 passes et 5 rebonds. En 1985/86, il fête sa première sélection au All Star Game tandis que les Blazers tente petit à petit de monter une armada pour rivaliser avec les monstres de l'époque, Lakers et Celtics en tête. Sur le papier, la franchise a tout pour voir le futur avec optimisme. Malgré l'échec à la draft en 1984, Kiki Vandeweghe rejoint l'Oregon à l'intersaison pour apporter ce qu'il fait de mieux : scorer. En 1985, le General Manager Stu Inman a plus de flair puisqu'il va chercher Terry Porter, futur lieutenant indissociable de Drexler, avec le vingt-quatrième choix de la draft.
Porter en meneur, Drexler à l'arrière, Vandeweghe sur l'un des postes trois ou quatre, c'est dommage que le pivot ait besoin de béquilles pour tenir debout. Le cinq majeur est complété par Steve Johnson qui prend la place de Bowie au poste de pivot et Kenny Carr ou Caldwell Jones pour aider Kiki sur les ailes. Pour scorer, il n'y a aucun problème puisque les Blazers sont même leaders de la ligue au rating offensif en 1986/87. Le vrai problème c'est quand les adversaires ont le ballon. Jusqu'au début des années 90, la franchise galère de son côté du parquet, malgré l'affirmation de Clyde Drexler en tant que star de cette ligue. Et oui, quand ton arrière superstar, aussi fort soit-il, est aussi ton meilleur défenseur, y'a un souci à régler, d'autant plus dans une NBA qui appartient encore aux intérieurs.
Prise de pouvoir
Une attaque élite c'est bien rigolo, mais après six ans d'échecs répétés en Playoffs, Drexler et les siens arrivent en 1989/90 mieux armés qu'ils ne l'ont jamais été. Porter et son leader s'occupent toujours des lignes arrières tandis que Jerome Kersey et Kevin Duckworth, à Portland depuis quelques saisons, semblent atteindre le point culminant de leur carrière. Seul nouveau, Buck Williams apporte enfin la garantie de défense élite dans la peinture dont les Blazers avaient besoin depuis la draft du Glide. Cinquante-neuf victoires en régulière, jusque là rien de nouveau, les Blazers assurent d'octobre à avril. Face aux Mavericks, PDX veut passer un tour de playoffs pour la première fois depuis cinq ans. Si Drexler est discret, Terry Porter flambe et est le principal artisan de la démonstration des Blazers. 3-0, un petit coup de balai, à qui le tour ?
Vainqueurs de Denver trois matchs à zéro également, les San Antonio Spurs de David Robinson et Terry Cummings se dressent face à rip city et Drexler, qui doit réhausser le curseur s'il veut emmener son équipe plus loin. L'arrière passe effectivement un cap dans ces demi-finales de conférence, mais il est bien aidé par Porter et Kersey qui continuent sur la lancée du premier tour et portent tout l'Oregon sur leurs dos. Blessé, Kevin Duckworth manque les six premiers matchs de la série mais est parfaitement remplacé par Clifford Robinson. Le propre des grandes équipes. À 3-3, les deux franchises se retrouvent au Memorial Coliseum de Portland pour en découdre. Après une série déjà énorme, le Game 7 est un classique. Porter porte encore les Blazers au scoring alors que Drexler finit la rencontre en quasi triple-double. Après prolongations, Robinson et San Antonio rendent les armes. 108 - 105, Portland wins. Treize ans après, rip city est de retour en finales de conférence.
En face, les Suns sortent d'une victoire 4-1 face aux Lakers, meilleur bilan de la ligue. Grosse confiance des deux côtés, mais l'avantage du terrain est pour Portland. Les Blazers et Drexler en profitent pour aller chercher deux grosses victoires 100-98 et 108-107 lors des deux premiers matchs. Le problème en Arizona, c'est qu'à trop vouloir jouer avec les cactus, ils finissent par piquer. À Phoenix, les Suns ne se font pas prier et après deux blowouts, la série revient dans l'Oregon à deux partout. Comme dit l'adage, une série de playoffs ne démarre pas tant que personne n'a gagné à l'extérieur. Autrement dit, plus le droit à l'erreur et Clyde The Glide l'a bien compris. Avec 32 points et 10 rebonds, le numéro vingt-deux sort peut-être son plus gros match depuis l'entame des playoffs. En face, l'énorme match à 28 points, 14 passes de Kevin Johnson ne suffit pas, les Suns s'inclinent 114-120 alors que Terry Porter pose un joli 3/6 à trois points.
Retour à l'Arizona Veterans Memorial Coliseum de Phoenix, et cette fois-ci ce sont les joueurs de Cotton Fitzsimmons qui sont sous pression. Une victoire = un peu de répit et un Game 7 à Portland, une défaite = direction Cancun et les Finals à la télé. Auteur de 36 points, Jeff Hornacek l'a bien saisi. Malheureusement, il est bien le seul au sein du cinq majeur de Phoenix. Sur le banc, Dan Majerle est solide avec 22 points mais en face le collectif compense les coups de moins bien. En manque d'adresse, Drexler peut compter sur son meneur Terry Porter pour assurer (4/7 à trois points), et sur les trois autres starters pour aller chercher leur petite quinzaine de points. En sortie de banc, Dražen Petrović (RIP) répond tant bien que mal à Majerle. Les Blazers sont solides, les Blazers confirment, et les Blazers sont de nouveau en Finales NBA. 112-109 à Phoenix, Drexler tient son gros coup et a l'occasion de prouver que se passer de Michael Jordan c'était peut-être pas une si mauvaise idée que ça.

Bien joué Joe
D'un côté, les Blazers enfin compétitifs d'un Clyde Drexler en plein prime. De l'autre, les Pistons champions en titre emmenés par le général Isiah Thomas et tous ses soldats. De part et d'autre, les parcours sont assez similaires : un sweep au premier tour suivi d'un parcours plus corsé en demies et finales de conférence. Si Drexler est monté en puissance tout au long de la campagne de son équipe en postseason, il prend un réel rôle de patron dans ces finales. À l'inverse, Terry Porter, impérial depuis le début des playoffs, ne shoote même pas à 40% sur la série.
Le problème c'est que de l'autre côté du parquet, on se pose beaucoup moins de questions. Du premier au cinquante-quatrième homme, chacun tient son rôle à la perfection face à des Blazers beaucoup trop dépendants de leur cinq majeur. Le duel Drexler - Thomas tient toutes ses promesses puisque les deux leaders sont au sommet de leur art. Trop seul, Clyde rend les armes en cinq manches. Malgré une série à 1-1, grâce à un classique posé par l'arrière de Portland à l'extérieur, les hommes de Rick Adelman ne gagnent pas un match à domicile et s'inclinent 92-90 dans le Michigan au Game 5.
Tous entre entre vingt-cinq et trente ans, les titulaires d’Adelman ont déjà un beau présent mais surtout tout pour briller plus fort encore à l’avenir. Et ça ne rate pas puisque dès 1991 rip city est de retour en finales de conférence, face aux Lakers de Magic Johnson, encore bien solide, et joliment entouré de James Worthy, Byron Scott ou encore Vlade Divac. Défaits d’entrée à domicile, les Blazers ne refont jamais leur retard et s’inclinent à LA dès le Game 6. Moins bien mais pas si mal. Magic à la retraite après une démonstration des Bulls en finale, « la prochaine c’est pour nous" s’est sûrement dit un Drexler encore bien sale cette année.
Et en effet, la saison suivante se passe pas trop mal dans le Nord-Ouest des States. Après une nouvelle grosse régulière, Portland roule sur sa conférence en playoffs pour aller retrouver des Bulls en quête de Back-to-back en Finals. Largement considéré comme le meilleur joueur de la ligue à l’époque, Michael Jordan a sûrement pris à coeur le fait de voir débouler son plus grand concurrent au poste d’arrière sur le parquet. À 25 points de moyenne sur les finales mais seulement 40% au shoot, The Glide ne réalise pas ses plus belles performances mais est tout de même plus que solide. À côté, ses lieutenants font mieux que l’accompagner jusqu’au Game 4. Totalement dans le match, Portland s’avance au Game 5 à 2-2, mené par des grosses performances de Terry Porter et Jerome Kersey, derrière un leader qui tente tant bien que mal de tenir la comparaison avec MJ. Spoiler : ça va pas durer. Pourtant c’est pas faute d’essayer. Cette cinquième manche se transforme en duel de pyromanes entre les deux franchise players. 30 points pour Clyde, pas mal. "I took that personally", ça vous dit quelque chose ? En face, His Airness balance 46 points sur la tête des Blazers et va tranquillement chercher une victoire à Portland pour s’offrir l’occasion de finir le boulot à domicile.

Ok Bugs Bunny
« 2+2 = 4 », « l’eau ça mouille »… « Michael Jordan en finale = bague » ça fait aussi partie de ces phrases plutôt logiques, et la bande à Drexler en fait les frais en ce mois de juin 1992. Pendant trois ans, PDX a regardé dans le blanc des yeux n’importe quelle équipe NBA mais a laissé passer le train par deux fois en Finales NBA. Face aux Pistons, puis face aux Bulls, rien de déshonorant mais deux occasion manquées pour Clyde Drexler de rentrer dans la caste des joueurs qui ont mis une franchise dans leur sac à dos pour aller chercher un titre. Les saisons suivantes restent sérieuses mais pas de quoi inquiéter grand monde en playoffs.
Nouveau cycle
Justement, Clyde sent qu’il commence à fatiguer et qu’il serait peut-être temps de faire un tour chez le bijoutier pour trouver bague à son doigt. En 1994, les Rockets d’Akeem - devenu Hakeem - Olajuwon (comme on se retrouve) profite de la première retraite de Jordan pour taper les Knicks de Patrick Ewing en sept matchs. L'ancien camarade de classe qui gagne avec Houston ça fait sûrement plaisir à Drexler mais il se dit surtout qu’il aimerait en faire partie. Ça tombe bien, en quête de back-to-back, la franchise texane voit d’un bon oeil l’apport d’un vétéran au niveau All Star à la trade deadline 1995. Un petit caprice de l’arrière, une petite peur de voir la légende partir contre rien à la free agency et Portland accepte de l’envoyer à H-town en échange d’un pick de premier tour et Othis Thorpe.
Plutôt un bon move étant données les difficultés de l’équipe d’Hakeem The Dream en saison régulière. En effet, les Rockets entament les playoffs 1995 avec un bilan de 47-35 et une sixième place à l’Ouest. En face, le Jazz de Malone et Stockton sort d’une saison bien sérieuse et s’avance sereinement. Pareil pour les Suns en demi-finale de conférence, puis pour les Spurs en finale de l’Ouest. Mais tu peux être aussi serein que tu veux, quand t’es face à des Olajuwon et Drexler en mission, ça complique les choses. L’Américo-Nigérian est le leader incontesté mais derrière lui l’ex-Blazer remplit son rôle à merveille. Besoin de scoring ? On va chercher du bucket. Besoin de laisser de la place au boss ? Vas-y Hakeem. Besoin de défense ? Fin de la blague mais t'as l’idée.
Les Rockets viennent finalement à bout de l’Ouest après trois séries serrées, à chaque fois en tant qu’outsider. Le tandem Drexler - Olajuwon est un magnifique exemple de duo extérieur - intérieur. Quelques mois et surtout quelques séries de playoffs auront suffi pour le prouver. Ça tombe bien en Finales NBA, Houston fait face à l’une des associations les plus flashys que la ligue ait jamais connu : Penny Hardaway - Shaquille O’Neal. À l’inverse de son adversaire, Orlando a tranquillement dominé sa conférence en saison régulière, avant de tenir son rang en playoffs derrière sa paire de jeunes stars.
Des jeunes insouciants face à des darons expérimentés, voilà le menu de ces NBA Finals 1995. Et dès l’entrée, les cuistots nous régalent avec un Game 1 disputé au bout duquel le Magic a l’opportunité de clore les débats. 110-107, dix secondes sur l’horloge, Nick Anderson est envoyé sur la ligne des lancers. Le swingman tourne à 70% aux lancers sur la saison et est sur un gros match à 22 points à 9/17. Stupeur, deux briques coup sur coup. Pas de quoi saper le moral du numéro 25 floridien qui prend son propre rebond pour provoquer une nouvelle faute des Rockets. Sept secondes, trois points d’avance, deux lancers à venir, là normalement c’est bon. Désolé Clyde, désolé Hakeem mais il va falloir revenir après-demain pour le match 2.
Le joueur d’Orlando tente sûrement de reprendre ses esprits tranquillement avant d’y retourner. Les deux premiers étaient trop courts, un peu plus de jus et les deux suivants… sont trop longs. Dommage pour Nick the Brick qu’il n’y en ait pas eu deux de plus, ça aurait fait swish à coup sûr. Quatre ratés, rebond et temps-mort Rockets avec cinq secondes à jouer, le match est relancé. Pour achever Anderson, le sniper Kenny Smith se charge de ramener les deux équipes à égalité à une seconde du buzzer.
118-118 à cinq secondes de la fin de la prolongation, ballon Houston. Au cœur d’un match compliqué, Drexler hérite de la balle, drive puis s’envole pour un lay up… un peu court. Mais Shaquille O’Neal sorti sur Drexler, personne ne peut rivaliser avec Olajuwon dans la raquette. Le MVP 1994 prend le meilleur sur les trois nabots autour de lui (oui, même toi Horace Grant) et offre la victoire à H-Town. Les trois centièmes restants sur l’horloge ne suffisent pas au Magic pour rattraper le gros choke de l’ami Nick.
Un match qui annonce une série épique ou un coup derrière la nuque trop dur pour Shaq, Penny et Orlando ? Le blowout du match 2 répond rapidement à la question. 117-106, les Rockets repartent avec deux victoires et le Magic dans les rétros. Bien emmené par son leader dans la raquette, Clyde Drexler fait des finales excellentes dans un rôle de lieutenant et va chercher la bague qui s’était refusée à lui en 1990 et 1992. De même, le back-to-back de Houston permet à son duo de cyborgs de rattraper la finale NCAA perdue en 1983.

Deux gros sourires pour une belle bagouze
Après la consécration, la fin du parcours
Michael Jordan, revenu en NBA au cours de la saison 1995, attend l’exercice suivant pour reprendre son implacable domination sur la ligue. Suite au quatrième titre des Bulls, Houston veut réagir et le fait d’abord via le marché des transferts. À l’aube de la saison 1996/97, le GM Carroll Dawson tente un dernier push pour ramener une troisième bannière au plafond du Summit, l’ancienne salle des Rockets. Robert Horry et Sam Cassell, pièces essentielles des deux premiers titres, sont envoyés à Phoenix en échange d’un Charles Barkley vieillissant. Une réunion de superstars rarement vue en NBA avant ce move, mais surtout une réunion de vétérans avec plus de kilomètres au compteur qu’une Twingo première génération encore en circulation.
Un trade discutable mais au final la Twingo en a encore un peu dans le moteur. Une régulière solide et les Rockets se retrouvent en 57-25 au moment d’aborder la postseason. Les jeunes Timberwolves ne font pas le poids. Kevin Garnett, Tom Gugliotta et Stephon Marbury sont renvoyés à la maison par un joli sweep texan. Houston retrouve ensuite les Supersonics, bourreaux de Drexler et Olajuwon la saison précédente. Un Big Three en affronte un autre puisqu’à Seattle c’est Payton, Kemp et Schrempf qui font lever les foules.
Après quatre matchs pourtant, la série manque de piment. Les Rockets mènent 3-1 et ont l’occasion de conclure à domicile. Drexler, à 34 ans, fait encore un sacré boulot à côté de ses deux compères All Stars. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Au terme de deux matchs largement dominés par Seattle, Rockets et Sonics se retrouvent à 3-3 et Houston tient une nouvelle occasion de terminer le boulot à domicile. Moment choisi par Clyde pour rappeler qu’il était d’abord un leader de franchise avant de rejoindre le copain d'école. 24 points, 8 passes, 8 rebonds, Drexler est un joueur all around et quoi de mieux qu’un Game 7 pour le rappeler ? 96-91, ciao Seattle et bonjour le Jazz.
En finales de conférence, c’est Karl Malone, John Stockton et toute la bande qui se présentent à nouveau face à Clyde, Hakeem et une bonne partie du Texas. Si les trois stars de Houston sont sur la pente descendante, le duo magique de Utah se bonifie avec l’âge. Auteurs de 64 victoires sur la saison régulière, les joueurs de Jerry Sloan se dressent en favoris de la série. Mais pour une équipe championne deux saisons auparavant en étant sixième de conférence, les statuts on s’en fout un peu. Après quatre matchs, les franchises se rendent coup pour coup et retournent à Salt Lake City sur un pied d’égalité. C’est là que ça se gâte…
Au match 5, Drexler sort une partie à 15 points, 1 passe et 33% au tir. Vraiment pas assez, surtout quand, excepté Hakeem, tous tes coéquipiers prennent exemple sur toi. Retour à la maison sans autre option que la victoire, sous peine de fin de saison… voire de fin tout court si l’on regarde l’âge moyen de la Team Rocket. Cette fois-ci, le numéro 22 fait plus que tenir son rang. 33 points avec un magnifique 5/7 à trois points et c’est tout Houston qu’il emmène avec lui, 98-91 à moins de deux minutes du buzzer. Des attaques mal gérés, une perte de balle de Drexler au mauvais moment, une défense trop molle et le Jazz revient à égalité pour la dernière minute. Les Rockets reprennent l’avantage grâce à deux lancers de Barkley pour mener 100 à 98. Entre monstres sans bague, pas de pitié. En quête de titre comme Barkley, Stockton égalise d’un floater au milieu de la défense texane avant d’avoir le shoot de la gagne dans les mains. Sir Charles en retard, Stockton du parking, ça fait swish et le Jazz est de retour en Finales NBA.

Ça en fait de la légende
Une dernière épopée en playoffs pour l’arrière le plus proche de Jordan dans les années 80 et 90. Au terme d’une saison encore bien sérieuse durant laquelle il perd cependant son statut de All Star, Clyde Drexler raccroche les sneakers après une élimination au premier tour des playoffs face au même Jazz. Olajuwon et Barkley remettent le couvert pour deux saisons à Houston. En perte de vitesse et avec un effectif moins garni, l’absence de Clyde se fait ressentir et l’ère de domination des Rockets prend fin. En termes de style de jeu ou de niveau intrinsèque, Clyde The Glide est le seul qui a réussi à rivaliser de près ou de loin avec Air Jordan. Bon, d’un peu trop loin, suffit de jeter un œil aux armoires à trophées.
Quinze saisons en NBA, trois apparitions en finales, dix sélections All Star, le tout couronné d’un titre avec son acolyte du lycée, on appelle ça une carrière solide. Tout ça au milieu des Celtics de Bird, des Lakers de Magic, des Bulls de Jordan et des Bad Boys de Détroit, s’il restait quelques miettes au milieu, Clyde a sûrement pris les plus grosses. De Houston à Houston, avec une grosse escale à Portland, The Glide a plané sur la NBA et ses paniers, sans oublier d’aller chercher le plus beau des trophées.
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